LE CIEL SANS BRAS
Le ciel sans bras
une sauvagerie
ou deux
nuit à la nuit
Ne pas renoncer à remonter le temps
les yeux s’étirent
une vague
la faim frotte 1a verge
Le crâne tiède sous les cheveux s’enroule
L’oiseau ailes tournées l’ourlet un peu de sang le matelas est nu
Nous voici vieux épars fluviaux et magnanimes
Sensiblement égal 1’amour a des charmes
l’épaule le ventre luttent
les mains lissent la porosité de la terre
le don des langues se plante dans 1’ombilic les mains
s’élancent de leur socle
suivant les chaumes
rasent le dos
vertèbre
Adam sculpté par Eve
avant le paradis
figuier des lèvres
simultané déduit d’arrache
claquement épars
lapements
lapides
noces oxygénées
fastes féroces
fougues d’amante
Le rêve sautille
statues sous 1’orage
volcaniques
les phalanges la sueur le parfum du drame l’écho des
fantômes
roide mon âme tenait la distance
tant de blancheur la cuisse et son buis quand l’éclair saisi ligoté caressé
déboula
la dame au lit dormait longeant l’huis qu’elle secouait
songe de maïs de raisin sec
elle entrouvrit les doigts et le réveil fila
Autrement dit
se pousser du bec
exigences sommaires
du bandonéon
Nous voici vieux épars fluviaux et magnanimes
Un brin de verveine derrière 1’oreille
les fichues cigales
elle n’aime pas les cigales
elle préfère la verveine
la verveine fait racine d’amour
à condition de le planter en kimono de paysanne
elle gratte la terre arrache l’herbe mauvaise
les manches laissent la peau nue
quand elle lève les bras
voici l’antique coutume des souveraines
une chatte escalade le romarin
les souvenirs filochent sur les parvis
roses
gazes grotesques
parade de bourgeois
barrière de parking
bing
un général à la retraite swingue
l’insolation
Assise sur le monument aux morts elle pense à la verveine
songe incivique repousse la parenthèse
à l’infini
le bleu le gris
beaucoup de vent
les choristes font
ah
on n’entend plus rien sauf sa respiration
elle me gratte la paume
comme aux noces guignols
nous rions bien
serrés dans le soleil
les baisers à la groseille sont délicieux
La saison morte s’achève
la saison s’entortille et s’assèche
fragments de feuilles vertes et de tulipes mauves
pâleur soupçons traquenards troussis Viandox casemates
ligatures les trompes d’eustache bruissent encore mais c’est
à peine et sans ressort
la saison morte s’achève
j’étais sans plaisir sans joie sans douceur sinon sans
peines et sans colère
trafiquant un sang d’encre
juste assez de force pour grossir
une baudruche qui s’envole pas
j’aimais l’amertume
le garrot
les paroisses noctambules
les choses qu’on ne retourne pas
les branches qui s’effondrent sous les oiseaux de proie
Tric-Trac l’épais monarque a cessé de jouir enfile son frac
Nous voici vieux fluviaux épars et magnanimes
Saint-Sébastien reçoit la flèche
d’en bas d’en haut
la poussée est formidable
la nuque bascule si fort vers 1’arrière
cela se passe entre les rochers et le soleil levant
le cœur aussitôt est arraché
noir il git au sol mais personne ne le voit
car Saint-Sébastien regarde la nue
et tous regardent son regard
il a si peur il a si froid
il n’a plus de baiser
Saint-Sébastien reçoit la flèche
et dans son ventre grossit une onde
vermeille
comme fut son cœur
il se tient debout on lui a appris à se tenir face aux
archers
les archers ont posé un genou à terre
ils sont aveugles et ils font mouche
Saint-Sébastien reçoit la flèche
elle le perce lui ne sent rien
et les archers se dressent
à tâtons ils reconnaissent le corps
le corps est souple et chaud
comme celui de leurs femmes
mais ils ne le savent pas
ils ne comprennent pas
le corps est plus lourd qu’avant
plus lourd mort que vif
parole d’archer
comme l’arc est plus lourd sans flèche
le dard plus lourd sans penne une figue écrasée pensent-ils
le cœur
pourtant ils sont pieds nus
puis ils retournent le corps
sans voir la bouche éclose au nom du ciel
Nous voici vieux épars fluviaux et magnanimes
L’AMOUR EN CAGE

La cage de l’amour en cage se prélasse sur la mousse
mais l’amour sans cage quel est son nom
tantôt il valdingue comme merle en ronces
tantôt pliant sa résille il rougit d’être en cage
à côté d’amours en cage
ou alors les cages se frôlent et l’amour
bouge à peine comme le cœur de l’araignée
au premier moucheron
Si l’on est malade d’amour très malade
sans prescription
saisir l’amour en cage entre les lèvres
il palpite dans la cage
ou la cage palpite c’est pareil
la dose habituelle ensorcelle
en cas de force majeure tripler la dose mais prendre soin
de s’étendre le matin à jeun
et du soir au matin sans témoin aucun
la cage de l’amour en cage ouvre sa dentelle et l’amour perd
la boule
La cage de l’amour en cage se prélasse sur la mousse
mais l’amour sans cage quel est son nom
A ROCHECOLOMBE
Cette langue de pierre dans le pré
rousse et soufre
ocre verte
d’huître soudée
lucioles y frétillent
plus bas l’eau
d’une peau immobile
s’inverse
le monstre calcaire
d’une faille suit
le scintillement
invisible
la langue se perce
coquilles
où doigts s’effritent
dure au gel
mate aux regards
une concrétion
nage
Cette ligne aux hanches minérales
crue
sans four ni ciseau
à Rochecolombe
sans parfum
sèche
quant aux colombes à Rochecolombe
la langue de pierre les a gobées
(1997)
LE SILENCE
C’est vrai
le silence
la voix change avant le silence
après aussi du reste
et pendant
les yeux se baissent
à terre une minuscule araignée écrasée par mégarde
un tuf recouvre l’oeil
le vide fait avancer
ou reculer d’ailleurs
nul courage à cela
l’instant où l’aiguille se détraque
la nuit où l’aiguille se détraque
la joue se pose sur l’oreiller
nulle dent de lait sous l’oreiller
(25 février 1997)
LE CARRÉ EST CARRÉ ET LE ROND EST ROND, PETIT PATAPON
Publiés sous le pseudonyme de Christian Bonzo en 1973 chez Grasset, ces poèmes sont accompagnés d’illustrations de France de Ranchin. Extraits. Cliquer sur les visuels.



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TRESSE
Tresse
Sans cesse
Tresse
Sans stress
Presse
Ô détresse
Sans stress
Princesse
Maîtresse
Ô diablesse
Souplesse
Caresse
Ô traîtresse
Tresse
Sans tresse
Prouesse
Vitesse
Ô fesse
Vengeresse
Vieillesse
Sécheresse
Tendresse
Tresse
Tristesse
Rudesse
Retresse
Sans stress
Redresse
Tresse
Ô kermesse
Délicatesse
Tresse
Liesse
Finesse
Ô bougresse
Tresse
Forteresse
Sans cesse
Tresse
Sans stress
Confesse
Messe
Grossesse
Expresse
Prouesse
Politesse
Noblesse
Tresse tresse
Presse
Adresse
Tristesse
Tresse sans tresse
Détresse tresse
Sans cesse
Sans stress
Redresse tresse
Retresse tresse
Sans stress sans cesse
Ô pécheresse
Ivrognesse
Ô maladresse
Détresse
Tresse
Enchanteresse
Tresse
Abbesse
Tresse
Prophétesse
Tresse
Ogresse
Tresse sans stress
Sans allégresse sans faiblesse
Dresse tresse
Sans cesse sans stress
Tresse ma détresse
(24 mars 2019)
DISCUSSION

Discussion
Réflexion
Prière
Réflexion
Délation
Prière
Destruction
Distorsion
Destruction
Discussion
Prière
Démarrassion
Révolution
(et quand elle chancela elle n’atteignit pas le nirvana
juste
lança l’application avec
application quand elle
chavira)
Prière
Hors raison
Destruction
Dissémination
(en parallèle
elle
ailes parallèles à l’envol)
Distinction
Prière et
Discussion puis
Réflexion puis
Réflexion
Prière
Matrice deum
omnipotentem
Rachat cracha
(15 décembre 2020)